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lundi 9 juin 2014

Publications 2006-2014


A.     Articles

Mots-clés :
Francophonie, analyse du discours politique, Argumentation dans le discours, Didactologie des Langues-Cultures, langue et littérature arabes, philosophie politique.

Dans Agora Vox avec comité de lecture

2012. « Tunisie postrévolutionnaire : le choc des cultures » dans Agora Vox le média citoyen. Rubrique « International, politique », publié le 16 mars 2012.
http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/tunisie-postrevolutionnaire-le-
112554.

2012. « Hommage à Habib Bourguiba, intellectuel, homme d’État et fondateur de la Tunisie moderne. 2000-2012 », dans Agora Vox. Rubrique « Tribune Libre ». 7 avril

2012 « Tunisie : finalités d’un gouvernement théocratique » dans Agora Vox du 9 avril, rubrique « Tribune libre ».
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/tunisie-finalites-d-un-114243

Articles scientifiques dans des revues Internationales avec comité de lecture

2014. « La Traductologie aux confins de la Culture » publié dans la revue Les Essentiels Maqalid n°3 «  L’état des lieux de la traduction du livre arabe en France ». Semestriel. PP. 151-163. Titre en liaison : Maqālīd = ISSN 2263-8039.  Publications du Bureau Culturel Saoudien à Paris et du Ministère de l’Enseignement Supérieur. Directeur de la publication Professeur Ibrahim al-Balawi. 163p.
Numéro publié à l’occasion de la participation du Ministère de l’Enseignement supérieur du Royaume d’Arabie Saoudite à la 34ème Édition du Salon International du Livre, Paris 2014. (Joint au dossier de qualification)

 2014. « Monde arabe entre islamisme et laïcité. Choix, stratégies politiques et perspectives futures » dans Actes du Colloque de l’Université de Fez 3-5 décembre 2012 "L'Arabité entre conceptualisation et médiatisation". pp.251- 261. Publications USMBA- 2014 ISBN: 978-9954-9496-2-7 Imprimerie info-Print- Fès/ Maroc
  
2012. « L’argumentation dans le discours. Parcours théorique et projections didactiques » dans SEDLL Linguaje Y Textós n°35. Université de Corogne. Éditions SEDLL (Sociedad Española de Didactica de la Lingua Y la Litteratura), pp. 47-60.

2012. Aux sources du discours argumentaire. Aristote et la Rhétorique » dans Synergies Monde Arabe 8, Interdits et Révolutions dans la Pensée Arabe de l’Antiquité à la Modernité. Coordonné par Henda Dhaouadi et Daniela Firanescu. Revue du GERFLINT, pp. 43-66.

2012. « République et démocratie dans la pensée bourguibienne. Réflexions et perspectives » Séminaire du 25 juillet 2011 à Monastir, organisé par M. Jamil Sayah Professeur de Droit Public de l’Université de Grenoble. Ouvrage collectif aux Éditions Elyzad. Tunisie.

2011. « De l’usage du français en classe de Sciences de la Vie et de la Terre en Tunisie. Difficultés et perspectives » avec la collaboration de Mansour Sayah de l’Université Toulouse Le Mirail 2. Synergies Monde Arabe 7.


2011. « De l’énonciation en classe de langue : de la théorie à la pratique » dans Synergies Venezuela n°5 Littérature, didactique et discours. Coordonné par Yolanda Quintero de Ricón et Verónica Bustamante. P. 194-204.
  
2010. « 25 Juillet 1956, Substituer la République à une indigne monarchie ». Habib Bourguiba déclare la République. Essai d’analyse de discours. Dans la Revue ANADISS du Centre de recherche Analyse du Discours de l’Université Stefan Cel Mare de Suceava, Roumanie. N°9/10. Volume I, Intertexte / Interdiscours, pp199-224. 

2010. « La polyglossie de l’arabe dans les pays du Maghreb » dans Mellouli (DIR), Les Temps Modernes du Maghreb. Alger. Publications Casbah Éditions. En collaboration avec Mansour Sayah, pp. 121-130.
  
2009. « Analyse du discours politique et Didactologie des Langues-Cultures : la rencontre de deux domaines dans les Sciences du Langage » dans Synergies Espagne n°2. Coordonné par Sophie Aubin, pp. 51-62.

2009. « « Pour une coopération méditerranéenne ». Athènes le 05 avril 1965. Analyse d’un discours d’Habib Bourguiba. Avec la collaboration de Jacques Cortès Professeur Émérite de l’Université de Rouen, dans Synergies Monde Arabe n°6 Recherches francophones sur le récit arabe classique. Coordonné par Antonella Ghersetti & Henda Dhaouadi, Ibrahim al-Balawi, pp. 337-348.
  
2009. « La langue arabe, histoire et controverses » avec la collaboration de Mansour Sayah & Raja Nagem, Université Toulouse Le Mirail 2, dans Synergies Espagne n°2, coordonné par Sophie Aubin, pp. 63-78.

2009. « Pour une synthèse culturelle entre Orient et Occident » Communication au IIIe Colloque International de l’Université Pédagogique de Cracovie, du 5 au 7 juin 2008 dans Synergies Pologne n°6, Actes du Colloque, Volume I, pp. 215-222.

2009. « Le français en Tunisie : bilan et perspectives » Revue Agora. Tunis, publications de l’Université des Lettres et Sciences Humaines, pp. 136-156.

2008. « Essai de Didactologie des Langues-Cultures : pour une nouvelle conception de l’enseignement apprentissage des langues-cultures » dans Synergies Espagne n°1. Coordonné par Sophie Aubin, pp. 75-88. ISSN : 1961-9359.

2008. « Pour un enseignement de l’humanisme. Essai de Didactologie des Langues- Cultures » avec la collaboration de Joseph courtès et Mansour Sayah dans Synergies Monde n°4, Hommage à Edgar Morin pour son 87ème anniversaire. Coordonné par Jacques Cortès, Nelson Vallejo Gomez et Laurent Pochat, pp. 81-96.

2008.  « Le Discours de Beyrouth de Habib Bourguiba, 10 mars 1965, Pour un dialogue des cultures. Essai d’analyse » dans Synergies Monde n°5, actes du XIIe Congrès de la FIPF « Faire vivre les identités francophones », Québec, juillet 2008, coordonné par Jacques Cortès, Pierre Janin, Henda Zaghouani-Dhaouadi. Publications du Gerflint, pp. 83-94. ISSN : 1951-6908
  
2008. « Le cadre littéraire et historique de la poésie arabe préislamique » dans Synergies Monde Arabe n°5, Les Mu‘allaqât et la poésie préislamique autour des récentes traductions de Pierre Larcher. Coordonné par Henda Zaghouani-Dhaouadi. Publications du GERFLINT, pp. 23-46. ISSN : 1766-2769.
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Mondearabe5/hendazag.pdf

2008. « Pierre Larcher entre Sémitologie et Traductologie, une voie complexe vers la poésie arabe classique et préislamique » avec la collaboration de Pierre Larcher, dans Synergies Monde Arabe n°5, pp. 217-232.
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Mondearabe5/entretien.pdf

2007. « De la pluridisciplinarité en analyse de discours » dans Synergies Pérou n°2. Identité plurielle : regards croisés langue-culture-science. Coordonné par Olinda Vilchez, Michèle Vanden Eynden et Nelson Vallejo-Gomez, pp. 28-59.

2007. « Habib Bourguiba, un homme à la pensée universaliste » dans Synergies Roumanie n°2, Pour une approche ‘‘complexe’’ de la Francophonie. Coordonné par Dorin Constantin Domuta et Calin Teutisan, pp. 161-178. ISSN 1841-8333.

2007. « Le Discours de Beyrouth de Habib Bourguiba, 10 mars 1965, « Vouer aux valeurs spirituelles et morales le culte le plus profond », une conception progressiste de la religion chez Bourguiba. Essai d’analyse » dans Synergies Monde Arabe n°4, Langue arabe, langue française, traduction et interprétariat entre méthodologie et production littéraires. Coordonné par Ibrahim Al Balawi, Henda Zaghouani- Dhaouadi, Fayza El Qasim, pp. 227-238.

2004. « L’Orient et l’Occident peuvent-ils dialoguer ? Habib Bourguiba et la diversité de la Francophonie », dans Synergies Amérique du Nord n°1, Les défis de la diversité, coordonné par Jacques Cortès, Jena-Pierre Piriou, Béatrice Bennett, pp. 51-63, ISSN :
1766-85-73.

B.    Publications d’ouvrages et coordination de revues scientifiques avec comités scientifiques et de rédaction

Mots-clés, thèmes essentiels
Linguistique et littératures arabes et francophones, Francophonie, analyse de discours politique, Traductologie

1° Publication d’ouvrages avec comités de lectures

2013. (Juillet) La Francophonie d’Habib Bourguiba. Essais d’analyse de discours. 1960-
1970. Édition revue et corrigée. Éditions Universitaires Européennes. Heinrich-Böcklin-
Sarrebruck. ISBN 978-613-1-54480-4. Volume I. 337p. En cours, le Vol. II.


2011. (Septembre) Le pèlerinage oriental de Habib Bourguiba. Essais sur une pensée philosophique, février-avril 1965.
Éditions Publibook, Paris, 394p. ISBN : 97822748367461.


2007. La Francophonie d’Habib Bourguiba. Essais d’analyse de Discours. 1960-1970. Presses Universitaires de Lilles. ANRT Éditeur, 740p. ISBN 2-7295-7055-1
http://www.decitre.fr/livres/La-francophonie-de-Habib-
Bourguiba.aspx/9782729570552


2° Coordination de revues scientifiques Internationales avec comités scientifiques et de rédactions


2011-2012. Henda Zaghouani-Dhaouadi, Daniela Firanescu, Synergies Monde Arabe 8.. Interdits et révolutions dans la pensée arabe de l’Antiquité à la Modernité. Publications du GERFLINT.

2010. Henda Dhaouadi, Antonella Ghersetti, Synergies Monde Arabe 7. (Professeur de l’Université Ça Foscari de Venise. Département des Études Eurasiatiques) : Essais de linguistique arabe. Publications du GERFLINT.

2010. Jacques Cortès, Henda Zaghouani-Dhaouadi, Jean-Jacques Liziard, Laurent Pochat et Madeleine Rolle Boumlic. Dialogues et Cultures n°55. Actes du XIIe Congrès mondial de la FIPF : Faire vivre les identités francophones. Volumes I, II, III, 2000p. Publications du GERFLINT.

2009. Antonella Ghersetti, Ibrahim Al-Balawi, Henda Zaghouani-Dhaouadi,  Synergies Monde Arabe 6 : Recherches Francophones sur le récit arabe classique. Publications du GERFLINT.

2008. Henda Zaghouani-Dhaouadi. Synergies Monde Arabe 5..  Les Mu‘allaqât et la poésie préislamique : autour des récentes traductions de Pierre Larcher. Publications du GERFLINT

2008. Jacques Cortès, Malgorzata Pamula et Laurent Pochat, Henda Zaghouani-Dhaouadi. Synergies Monde 2.: Actes du Colloque International des rédacteurs en chef du GERFLINT, Besançon 2007. Publications du GERFLINT.

2008. Jacques Cortès et Pierre Janin, Henda Zaghouani-Dhaouadi. Synergies Monde 5. Faire vivre les identités francophones, dirigé par Jacques Cortès, en collaboration avec. Pré actes du XIIe Congrès Mondial de la FIPF de Juillet 2008. Publications du GERFLINT.

2007. Ibrahim al-Balawi, Fayza El Qasem, Henda Zaghouani-Dhaouadi. Synergies Monde Arabe 4..  Langue arabe, langue française, traduction et interprétariat entre méthodologie et production littéraire.



D- Conférences, journées d’études, Séminaires

30 avril 2014. Henda Zaghouani-Dhaouadi.
« Langues, cultures dans le monde arabe : le statut du judéo-arabe en Tunisie ». CNRS, Université Toulouse Jean-Jaurès.

21 mars 2014. Henda Zaghouani-Dhaouadi. Journées d’études. Université de Sousse, Tunisie « Conflits mémoriels : conflits entre le français et l’arabe standard moderne dans les pays du Maghreb ».

19 Mars 2014. « La Francophonie d’Habib Bourguiba. Bilan et perspectives ». Conférence invitée à l’Université de Toulouse le Mirail II. Séminaire sur la Francophonie.

26 septembre 2014. Henda Zaghouani-Dhaouadi. « Quel statut pour le français dans les anciens pays colonisés ? » Université de Beni Millal (Maroc).

17 janvier 2014, « Qu’est-ce que la sociolinguistique urbaine ? » CNRS, Université Sorbonne Nouvelle, Séminaire de Michel Bagnnard (Dir. d’études).

26 février 2014, Henda Zaghouani-Dhaouadi. « Langues étrangères : problèmes de compétences et de performances » Séminaire de Michel Bagnnard CNRS. Sorbonne Nouvelle.

16 Décembre 2013, Henda Zaghouani-Dhaouadi. « Enseignement apprentissage des langues étrangères lors du printemps arabe » Toulouse Association de défense de la langue française

3-5 décembre 2012.Henda Zaghouani-Dhaouadi. « Monde arabe entre islamisme et laïcité. Choix, stratégies politiques et perspectives futures » conférence au Colloque International de l’Université de Fez.

2010. Henda Zaghouani-Dhaouadi. Le français au contact de l’arabe et du Berbère dans les pays du Maghreb. Université autonome de Barcelone. Espagne.

2009. Henda Zaghouani-Dhaouadi. Le langage : origine, nature et diversité. Tunis, Institut Bourguiba des Langues Vivantes.

2008. 2-4 juin. Henda Zaghouani-Dhaouadi. Participation à la 3ème rencontre internationale des Rédacteurs en Chef du GERFLINT. Université Pédagogique de Cracovie.

2007, 3-4 mai. Henda Zaghouani-Dhaouadi. «  Le texte et le discours ou de l’implicite dans le langage » conférence. Journées d’Études Interlangues des linguistes de l’ERIAC (Équipe de Recherche sur les Aires Culturelles Indo-européennes), L’implicite dans les théories linguistiques et ses utilisations en discours. Université de Rouen UFR LSH, Organisé par Madame Filippi-Deswelle Catherine, Salazar et Dupraz Emmanuel.

E. Colloque avec ou sans coordination des actes


7-10 juin 2010. 5ème colloque international des langues et des cultures « Inférence, Ellipse et Parabole » et 5ème Rencontre des Rédacteurs en Chef du GERFLINT, Université Pédagogique de Cracovie.

2009. 15-19 avril. 4ème Rencontre des Rédacteurs en Chef du GERFLINT. Malte.

2007. 23-26 mai 2ème Rencontre Internationale des Rédacteurs en Chef du GERFLINT, au Centre de Linguistique Appliquée, Université de Franche Comté, Besançon.


F- Projets de recherche en cours

  1. Un essai achevé de philosophie politique : Habib Bourguiba. Essai sur une synthèse entre Orient et Occident. Á paraître.

  1. Synergie Monde Arabe 9. Monde arabe et Francophonie. Bilan et Perspectives. Avec le Professeur Ibrahim Al-Balawi. Prévu pour 2014.

  1. Rédaction d’un Essai autobiographique Le Choix Ultime.

  1. Conférence invitée au séminaire des Journées doctorales. Université de Toulouse Le Mirail II «  Didactologie des Langues Cultures. Recherches actuelles et perspectives ». Fin juin 2014. 

mardi 29 avril 2014






Appel à Contributions
Synergies Monde Arabe 9

Monde arabe et Francophonie.
Bilan et perspectives

Coordination
Ibrahim al-Balawi
Henda Zaghouani

De récentes réflexions, sur la Francophonie dans le monde arabe, faites à partir d’ouvrages et articles sur le sujet en donnent une vision très étroite. La langue française apparaît en crise dans cette vaste région géographique, car incapable d’opérer un échange égalitaire entre les langues arabes et le français en favorisant un plus grand apprentissage de l’arabe en France.
En fait, le contact avec la recherche en France dans le domaine des langues sémitiques et notamment de l’arabe a énormément évolué au cours des  trois dernières décennies. Aujourd’hui, la langue arabe tient une place de choix dans les Universités tant françaises qu’européennes. Les numéros précédents de Synergies Monde Arabe (particulièrement les 4, 5, 6, 7, 8) confirment une activité de recherche continue au sein des laboratoires du CNRS et des Universités en France et ailleurs en Italie, en Pologne, en Allemagne et en Angleterre, aux Etats-Unis pour ne citer que ces pays-là.
Affirmer donc que l’arabe est une langue minorée face au français en Europe et en France précisément et que la Francophonie est une réalité unilatérale, est une ignorance de l’état de la recherche sur les échanges francophones qui se font au quotidien.
Ce numéro de Synergies Monde Arabe voudrait donc être l’espace d’un bilan et perspectives sur les rapports francophones qui existent entre langue arabe et langue française sans oublier les autres langues européennes qui ont le français en partage. 
Nous abordons donc, dans ce numéro, des questions relatives aux échanges entre monde arabe et francophonie. On s’intéressera spécifiquement à la recherche dans les domaines des Sciences du Langage, de la Traductologie et de la Didactique (que ce soit la didactique de l’arabe dans son rapport à la langue française, ou du français en tant que langue de communication et de culture dans le monde arabe). Ces trois axes pourront ainsi donner lieu à quatre problématiques essentielles :
-          La didactique de l’arabe en Sciences du Langage et ses rapports à la didactique du français

-          La Traductologie du français vers l’arabe et de l’arabe vers le français comme moyen de dialogue et de communication scientifique, littéraire et interculturelle

-          L’enseignement du français dans les pays arabes : vision du législateur et perspectives

-          Le texte et le discours, l’analyse du discours entre langues et cultures

Ces divers axes ne sont que des orientations majeures pouvant évidemment se diversifier en sous thèmes.

L’envoi des propositions d’articles est attendu pour la date limite du 30 mars 2014 et des articles définitifs pour 30 juin 2014.
 

mardi 1 avril 2014



Ceci est une contribution au séminaire qui s'est tenu à Monastir du 24 au 25 juillet, 2011. Je la publie ici car elle rappelle la pensée politique d'Habib Bourguiba et sa philosophie de l'homme. Je pense que ce texte est encore d'actualité en ces temps que les Islamistes continuent, malgré leur départ du pouvoir, à  se mouvoir dans un espace où la démocratisation institutionnelle et de pensée, se met progressivement en place. L'espoir de voir cette mosaïque culturelle qu'est la Tunisie se fondre dans un esprit global ouvert aux libertés individuelles et d'expression me donne envie de dire tout simplement que rien ne vaut une politique de l'homme, celle préconisée par Bourguiba lui-même et ses compagnons Hamani Diori du Niger et Léopold Sédar Senghor du Sénégal, et avec lesquels il fonda l'ACCT, l'Agence Culturelle et Technique, Aujourd'hui Agence pour la Francophonie.


 Séminaire du 24-25 juillet 2011 à Monastir

République et démocratie dans la pensée bourguibienne
Réflexions et perspectives


Cette modeste contribution que je présente aujourd’hui traite de la pensée républicaine de Bourguiba, fruit de l’analyse d’un bon nombre de ses discours.
L’activité politique de cet intellectuel engagé se double d’une ouverture au monde, essentielle au progrès et porteuse d’humanisme. Occident et Orient sont ainsi liés intrinsèquement depuis des millénaires et leur coopération devra s’imprégner de plus de justice et d’égalité.
Les tournées africaine et moyen-orientale, de 1965, ont montré à travers les discours que Bourguiba avait prononcés, un homme d’État tout à fait engagé dans la réforme de l’Esprit, attaché à une politique qu’il appellera de ses mots « Politique de l’Homme ».
Dans ce syncrétisme culturel qui le caractérise, Bourguiba établit une politique interculturelle, unique au Maghreb, fondée sur le respect des diversités et  le choix d’un transculturalisme riche en histoire et en acquis pour la Tunisie. L’enseignement bilingue, qu’il approuva et mit en place à l’école dès le primaire et dont j’ai moi-même bénéficié, a été une chance extraordinaire à une époque où l’objet de cette belle réforme était bien de garder la richesse d’une langue qui nous a ouvert les portes du monde et donnés accès aux connaissances dans leurs complexité et richesses.
Dans ce cadre, je m’arrêterai à la conception bourguibienne de la politique et notamment de la démocratie dans le cadre républicain. Je m’appuierai essentiellement sur les analyses que j’ai eu l’occasion de faire de ses discours, en particuliers celui de 1957 et ceux de 1965, périodes charnières dans la politique bourguibienne, celle des réformes qui ont édifié la Tunisie moderne. Pour ce faire, je m’arrêterai sur la déclaration de la république dont il a été, avec ses camarades de lutte, un fondateur.


Bourguiba et la république : une relation paternelle
Contexte historique : La déclaration de la république
En 1957, le 25 juillet, Bourguiba prononce un célèbre discours devant l’Assemblée Constituante intitulé « Substituer la République à une indigne monarchie ». Au cours de cette longue allocution, il rappelle le contexte dans lequel intervient cet événement et les soubassements historiques, politiques et sociaux qui l’ont motivé. Peu de temps avant, le 31 mai, l’article 3 de la ratification des décrets préparés par le gouvernement, préfigurant la fin de la monarchie, stipula que « tous les privilèges, exonérations ou immunités de quelque nature que ce soit, reconnus actuellement aux membres de la famille beylicale, sont abolis ». L’importance de cet événement était donc de taille : le discours est, à la fois, une mise au point du débat qui eut lieu entre les différents orateurs de l’Assemblée, sur les inconvénients de la monarchie en Tunisie, et une analyse personnelle de la situation de l’époque par Bourguiba.
Les hypothèses de lecture, qui s’imposèrent à moi alors, ont montré, tout au long de l’analyse de ce discours, que la pensée républicaine de Bourguiba était nourrie de fondements théoriques essentiellement philosophiques et qu’il éprouvait déjà dès 1957 des difficultés à les adapter tels quels au contexte tunisien. En effet, la Tunisie sortait de plus d’un siècle de monarchie absolue sous l’autorité ottomane soumise au protectorat français dès 1889. Comment faire pour mener cette grande réforme de l’Esprit qu’il voulait élaborer ? Il fallait alors entreprendre l’éducation du peuple, déjà tentée au moment de sa lutte contre le colonialisme.  
Ce projet de relever l’Homme et de lui redonner une dignité et une conscience c’est, je pense, le noyau, et, sans doute, la source qui aura permis la révolution du 14 janvier 2011. Dans cette révolte, un peuple s’est élevé pour réclamer ses droits à la justice, à l’égalité, à la liberté d’expression et donc à la démocratie après plusieurs années d’oppression, de dictature, de censure et de pillage. Aujourd’hui encore, certains réclament un État laïque et d’autres les accusent d’apostats car pour eux la relation entre les humains n’est pas régie par les humains eux-mêmes, mais par des forces métaphysiques transcendant l’homme. Cette conception de l’État risque de mener à un régime monarchique régit par des lois religieuses. Les conséquences en seraient catastrophiques si l’on considère tous les acquis qui ont construit la Tunisie actuelle depuis 1956. 
À la fin de ce fameux discours, Bourguiba assurait déjà que : « le peuple tunisien a atteint un degré de maturité suffisant pour assumer la gestion de ses propres affaires. Je sais, ajoute-t-il, toute l’affection qu’il me porte. Certains ont pensé que je pourrai prendre en charge ses destinées. Mais j’ai un tel respect pour le peuple tunisien que je ne lui souhaite pas de maître et que le seul choix que je puisse lui indiquer est le choix de la République ». 
La république étant présentée comme le régime idéal pour les Tunisiens, comment argumente l’orateur en faveur de cette opinion ?
Pour lui en effet, l’abolition de la monarchie s’est faite dans « le calme et la dignité », comme il le dit, ce qui apparaît à ses yeux exceptionnel. Il fait allusion aux mutations que générèrent les grandes révolutions française, anglaise et bolchevique et la violence dont elles ont été empreintes.
Bourguiba précise ainsi qu’il faut en finir avec la monarchie, mais pas avec les monarques, ni avec ceux qui en sont des alliés, car la république doit les traiter avec dignité. C’est ce qu’il souligne lorsqu’il affirme : « C’est un fait remarquable qui tiendra votre attention comme il retiendra l’attention du monde entier que, pour la première fois dans l’histoire, les représentants d’un  peuple se réunissent pour régler, en toute indépendance et dans le cadre de la mission pour laquelle ils ont été élus, le sort d’un monarque qui attend, dans son palais, le verdict de la Nation, conclusion d’un débat qui se poursuit dans le calme et la dignité. Habituellement, la monarchie, quand elle est récusée par les peuples ou les organisations qui en souffrent, est un régime qui finit dans les bouleversements et les révolutions marquées du sceau de la violence et de la force ».
À l’époque donc, le changement de régime fut une décision du Peuple souverain, définition spécialisée de « République », attestée d’ailleurs dès le 17ème siècle. Cet événement, est marqué par un discours polémique défini dans ses concepts et ses modalités puis développé à partir du déroulement des faits. 
Bourguiba avait mesuré l’enjeu d’un tel événement. Pour lui il était grand car il fallait créer et travailler, dans la continuité et par étapes successives, à sauvegarder la république, mais comme un régime démocratique, laïque où la souveraineté du peuple est valorisée dans un partage  réel des pouvoirs exécutif et législatif. D’ailleurs la question de la laïcité de l’État a de tout temps remué certains qui l’ont alors déformée en traitant Bourguiba d’apostat, comme au Moyen-Orient. Mais déjà, dans une interview accordée en février 1956 à l’hebdomadaire L’Action, il dit à propos de la laïcité : « On a cru que cela voulait dire l’abandon de toute religion… J’ai expliqué à mes compatriotes qui s’étaient inquiétés ce que nous entendons par laïque : la loi tunisienne sera une loi élaborée par les hommes et non une loi divine… laïque a été mal compris…, l’essentiel pour moi c’est la chose ». On comprend donc aujourd’hui que Bourguiba ne voulait pas imposer un État laïque au sens des Lumières où les religions seraient pratiquées en dehors de l’État dans le respect des diversités. Mais uniquement dans le cadre des lois. L’État est resté un État musulman mais ouvert sur le progrès et soumettant les lois de la Charia à une réforme adaptée au contexte tunisien et universel puisque la Tunisie n’est pas séparée du monde et doit continuer à évoluer et à se développer. Mais Bourguiba avait une réelle admiration pour la révolution turque et pour la personnalité d’Atatürk, que même s’il ne pouvait, à l’époque, imposer un changement total du régime de l’État tunisien, y espérait implicitement… Je pense même que cela faisait partie des perspectives, sur le long terme, de la politique des étapes. En effet, la laïcité de l’État se développera progressivement dans la pensée intellectuelle des Tunisiens. La République que concevait Bourguiba était donc laïque mais l’État tunisien était islamique. Un juste milieu, pour ne pas dire ambigüité, servait à calmer ceux qui voyaient dans la révolution turque une atteinte à l’Islam et à ses valeurs profondément humanistes.
L’on se demande alors aujourd’hui, après la révolution du 14 janvier 2011, si les Tunisiens sont en mesure de construire un projet démocratique où la république, déjà en place depuis 1957, serait laïque et conduirait au respect des droits inaliénables des hommes (Égalité, Fraternité, justice), des lois qu’ils auront eux-mêmes établies et approuvées ?
Lors de ce fameux discours de 1957, et dès l’exorde, Bourguiba place son discours dans le cadre du dialogue qui eut lieu entre les différents membres de l’Assemblée en développant une rhétorique contestataire dans laquelle il émet des réserves sur certaines dérives du débat portant sur la critique de la monarchie absolue ou constitutionnelle comme système politique, en la qualifiant de superflue dans cette polémique. Par contre, il affirme que la monarchie beylicale ne convenait plus aux Tunisiens. Il explique ainsi le double pouvoir de décision et de définition de l’Assemblée Nationale Constituante. Dans le discours, il confèrera un P de notoriété au mot « peuple ». Au-delà du « peuple » comme une communauté de personnes partageant les mêmes valeurs, le terme est utilisé comme un concept. Dans les cas où le terme apparaissait sans aucune marque de notoriété, l’orateur lui conférait le sens péjoratif de « masse de gens n’appartenant pas aux classes dominantes », surtout lorsqu’il évoquait le rapport de domination qu’entretenait le Bey avec lui.
La république se définit en effet comme un État dont la forme de gouvernement est fondée sur la souveraineté des citoyens. Mais cette souveraineté n’est pas une dictature et n’émane pas de décisions irréfléchies. Elle doit être le résultat d’un dialogue permanent entre le peuple et ses représentants dans une unité qui respecte les divergences. Les choses ne se passent pas souvent ainsi et Bourguiba en était conscient.
Le changement de régime ou de gouvernement, pour Bourguiba, doit être pacifique, emprunt de respect pour le gouvernement déchu ou partant, principalement lorsqu’il est fait par des républicains. C’est le droit au respect que requiert l’État quel qu’il soit. La violence et la loi de talion sont d’infructueuses manifestations passionnées auxquelles des républicains ne peuvent se permettre de recourir. Bourguiba donne ainsi une leçon d’histoire et d’éthique à ses camarades : ce sont les faits eux-mêmes qui condamnent le monarque et la monarchie et non les représentants du Peuple dans l’Assemblée Constituante. La République apparaît ainsi comme un choix dicté par la logique même des faits, en somme comme une dialectique, d’où sa nécessité historique. L’argumentation du tribun révèle ainsi son pragmatisme, la cohérence de sa pensée, son esprit stratégique et son attachement à la raison comme une vertu seule capable d’abréger la polémique pour avancer vers des décisions communes. Ce sont ces qualités qui ont permis à Bourguiba de fonder la République tunisienne et de réussir à mettre de l’ordre dans un pays où les divisions commençaient déjà à poindre parmi le peuple entre yousséfistes et bourguibistes.


L’homme d’État et le pouvoir chez Bourguiba :
« L’homme d’État doit être maître du gouvernement » (Cicéron : Rem publicam tenere )


Bourguiba avait gouverné avec des mains de fer et des gants de velours. C’est la politique du philosophe éclairé dont l’objectif premier est d’instaurer un équilibre des pouvoirs. Un homme d’État ne peut selon lui être un égoïste, aveuglé par le pouvoir. Il est de son devoir d’être juste, raisonnable et sincère. Pour lui donc, la politique doit être empreinte d’une éthique et doit se fonder sur la modération, l’altruisme et le respect des libertés individuelles. Dans ce cadre, le peuple n’est pas un monde abject et ignoble, mais participant au pouvoir. Dans cette conception dont Aristote, Montesquieu, John Stuart Mill, Rousseau et Hegel ont notamment été les inspirateurs, la politique est au service de la « Promotion de l’Homme », tel que cela apparaît chez J.J.Rousseau, et comme l’annoncera Bourguiba dans ses discours ultérieurs en 1965. Finalement, la République, mot formé de res « la chose, l’affaire » et publica « publique, qui concerne le peuple, la collectivité, ce qui est commun à tous », donne à ce régime politique toute la force que représente la souveraineté du peuple comme une charpente de la pratique du pouvoir et la définition de l’homme d’État. Bourguiba le savait bien en 1957 et son vœu était celui de concrétiser un régime politique démocratique évolué, fondé sur le multipartisme dans le respect des opinions et l’unité du peuple considérée « comme une famille » selon les propres mots du tribun.
On voit ainsi à travers le discours se profiler une formation discursive indissociable d’une philosophie dont les influences trouvent leur source dans des courants de la pensée politique, occidentale et orientale, et qui donneront à la politique tunisienne une forte résonnance dans le monde. On le voit lorsqu’il évoque la question de la monarchie constitutionnelle dans des pays développés comme la Grande Bretagne. Pour lui « la monarchie constitutionnelle exige que deux conditions soient remplies. D’abord qu’il y ait un roi digne d’être le symbole de l’État ; ensuite que la personne du roi appelle le respect du Peuple. Ce respect ne peut être fondé que sur la conduite et les qualités morales du monarque. La monarchie constitutionnelle est assurément une formule heureuse en Grande Bretagne. Il faut que le respect soit dû également au symbole et à la personne. Ce n’est pas le cas ici. D’autre part, il faut que l’on soit assuré d’un minimum de loyauté et de sincérité à l’égard de la souveraineté populaire. En Angleterre, un long passé témoigne de l’empressement du souverain à respecter la volonté populaire dont les « communes » sont l’émanation ».
 Bourguiba fait donc référence au rôle de la chambre des communes dans la monarchie anglaise et qui est la principale du parlement britannique où les Lords n’ont que le droit de suspendre la loi votée sans droit de regard sur le budget. L’objectif de cette chambre est donc de maintenir le travail du cabinet et le gouvernement y est désigné dans le parti majoritaire. Il met le doigt sur l’importance du partage des pouvoirs et la participation du peuple à ses diverses initiatives, dans le respect des lois.


Liberté politique et partage du pouvoir
« Il faut se mettre dans l’esprit ce que c’est que l’indépendance, et ce que c’est que la liberté. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent : et, si un citoyen pouvait faire ce qu’elles défendent, il n’aurait plus de liberté, parce que les autres auraient tout de même ce pouvoir » Montesquieu. (De l’Esprit des Lois)
Concernant aussi bien le souverain que le peuple, être libre politiquement, ne signifie pas faire ce que l’on veut, mais obéir aux lois. C’est l’acception que l’on trouve chez Bourguiba à travers ses discours. Comme Montesquieu, il considère que les hommes ne sont libres que sous un gouvernement modéré : « la démocratie, précise Montesquieu, et l’aristocratie ne sont point des états libres par leur nature. La liberté politique ne se trouve que dans les gouvernements modérés. Mais elle n’est pas toujours dans les états modérés. Elle n’y est que lorsqu’on n’abuse pas du pouvoir : mais c’est une expérience éternelle, que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites. Qui le dirait ! La vertu même a des limites » (De l’Esprit des Lois).
Ainsi, les abus du pouvoir ne peuvent être limités que par le pouvoir : « pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. Une Constitution peut être telle, que personne ne sera contraint de faire celles que la loi lui permet » ; la liberté politique est finalement réalisable grâce aux lois et doit se garder des abus de pouvoir.
À la lumière de ces précisions, on comprend mieux le discours de Bourguiba qui montre bien que le cadre tunisien de 1957 n’était pas de cet ordre, mais que la République devra œuvrer à y arriver. Pour lui, la liberté politique ne peut se fonder sur l’anarchie, la course effrénée pour le pouvoir et le prestige qu’il représente ; elle réside dans le respect des lois et le dialogue permanent entre les différentes instances : législative, exécutrice et juridique pour assurer la liberté. Le respect du pluralisme est donc la clé d’une bonne gouvernance et Montesquieu rappelle à ce propos la nécessité de séparer les trois pouvoirs comme garantie pour le fondement de l’État libre, ainsi « tout serait perdu, si le même homme, ou le même corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple, exerçait ces trois pouvoirs : celui de juger les crimes ou les différends des particuliers ».
Cette position de Montesquieu, s’inspire directement des Politiques d’Aristote qui, dans le chapitre X, se demande à qui donner le pouvoir. « Mais il y a une difficulté : qu’est-ce que doit être le [pouvoir] souverain de la cité ? En effet, c’est sans doute soit la masse, soit les riches, soit les honnêtes gens, soit un seul, le meilleur de tous, soit un tyran. Mais toutes ces [hypothèses] semblent comporter un inconvénient…][1]. L’inconvénient majeur, de chacune de ces parties c’est justement d’exercer le pouvoir seul en écartant les autres catégories sociales. On comprend donc le sens de la République telle qu’elle a été redéfinie dans le discours de Bourguiba. Il considérait le peuple tunisien dans la sagesse requise grâce à l’histoire qu’il avait vécue et dont il a tiré les leçons de prudence et de justice. La maturité du peuple évoquée par le tribun provient du concept de « raison humaine » d’où émane, justement, la loi positive dont parlait Montesquieu dans De L’Esprit des Lois. Chaque nation, en effet, a ses propres lois convenant à la « nature » et au « principe de gouvernement qui y est établi, ou qu’on veut établir… »
Ainsi se limiter au cadre tunisien était une bonne stratégie discursive pour l’orateur, car la loi qui émane de la raison, s’adapte aux diverses particularités des pays. Les valeurs, cultures, histoires étant complexes, la république prendra des formes différentes et s’adaptera aux données naturelles de chaque peuple. Cette vision de la République est donc chez Bourguiba le fruit de sa formation discursive notamment philosophique. Il a bien compris qu’il n’était pas très raisonnable de « copier-coller » des données sur un contexte différent, où le concept était encore peu acquis, peu admis, peu compris. Il fallait d’abord que la nouvelle politique républicaine se donne la tâche d’instruire les jeunes afin de leur donner l’occasion de l’améliorer plus tard et d’ouvrir la voie à une démocratisation progressive et sans violence du pays. Montesquieu ne disait-il pas aussi à propos des lois positives qu’elles « doivent se rapporter au degré de liberté que la Constitution peut souffrir, à la religion des habitants, à leurs inclinations, à leurs richesses, à leur nombre, à leur commerce, à leur mœurs, à leurs manières ; elles ont des rapports entre elles ; elles en ont avec leur origine, avec l’objet du législateur, avec l’ordre des choses sur lesquelles elles sont établies. C’est dans toutes ces vues qu’il faut les considérer »(Montesquieu, Ibid.). C’est dans ce sens que l’on pénètre aujourd’hui le discours de Bourguiba alors que cinquante quatre ans se sont déjà écoulés… fonder une république démocratique et un État laïque, s’il n’était pas encore évident à l’époque à travers le discours de l’orateur, il semble aujourd’hui qu’il l’est nettement plus surtout au vu des événements que nous voyons en Tunisie.

La révolution du 14 janvier, sans aucune préparation préalable, sans gouvernement d’échange, s’est faite dans une violence nécessaire qui a permis, grâce au fameux slogan « Dégage ! », de libérer le pays d’un tyran qui a monopolisé le pouvoir et pillé le peuple. Cette violence est le résultat direct du manque d’éthique dont le pouvoir de Ben Ali s’est caractérisé. Si pour Bourguiba, l’éthique est inséparable du pouvoir, pour Ben Ali, elles n’ont rien à voir l’une avec l’autre. Pour lui, il faut s’enrichir par la gouvernance et gouverner pour s’enrichir. Pour Bourguiba, il faut gouverner pour promouvoir l’Homme. La politique ne peut s’entendre avec l’opportunisme. L’Assemblée Constituante qui siègera après le vote du 23-24 octobre prochain sera représentative des volontés du peuple et de ses choix politiques.
Bourguiba, vers la fin de son discours de 1957 parle ainsi du peuple : « ce Peuple, comme une famille unie, sera responsable de son destin. S’il fait preuve de sagesse et de maturité, s’il sait choisir les hommes, qu’il s’agisse des députés, du chef de l’État ou des ministres, il prendra le chemin ascendant, celui du succès, de la prospérité, de la grandeur. Mais s’il fait mauvais usage de son propres droit, il ne s’en prendra qu’à lui-même ». On retrouve, en même temps que sa confiance, son attitude méfiante à l’égard du peuple, son appréhension du pouvoir. Le régime républicain ne peut être conçu en dehors d’une bonne démocratie où il existe  pluralité des pouvoirs et sagesse des concertations donnant ainsi lieu à des projets où apparaît justement la maturité des diverses parties du pouvoir, entre autre celle du peuple.


Perspectives…
Comment édifier une démocratie en Tunisie, alors que le modèle occidental auquel le Tunisien actuel cherche à s’identifier est, semble-t-il, aujourd’hui en crise ?

Il est admis, de nos jours, que la démocratie est en crise, un peu partout en Europe. On remarquera en effet une apathie politique croissante mesurée par des taux record d’abstentions, lors de certaines élections, notamment celles du 21 avril 2002 en France, des référendums et la crédibilité déclinante envers les hommes politiques. Ainsi, dans son ouvrage récent, Edgar Morin souligne cette difficulté de gouverner qui est inhérente à l’humanité. Il la considère comme « un art, non seulement par les qualités inventives et créatrices qu’elle exige, mais aussi par sa capacité d’affronter l’écologie de l’action[2] » et ajoute à juste titre : « L’art politique comporte inévitablement un pari, donc le risque d’erreur. Comme toute stratégie, il doit savoir allier un principe de risque à un principe de précaution. Aucun dosage entre ces deux principes ne peut être indiqué à priori » (2011 : 45).
Bien que la démocratie soit bel et bien en crise, on peut considérer donc cela qu’en apparence et se demander si « crise » serait un terme philosophiquement fécond.
En conséquence, en annonçant la crise de la démocratie, on autoriserait dans le même sens sa rupture avec les valeurs originelles qui l’on créées. Développer un discours de la déploration qui mesure le décalage entre l’essence de la démocratie et son actualisation dans l’Histoire, cela présume deux hypothèses : soit que son développement est obligatoirement conforme à ses principes originels, autrement dit à sa bonne nature, soit qu’elle dégénère en altérant la pureté de ses principes.
Serait-il constructif pour toute politique de continuer à considérer que la démocratie doit se vivre dans la seule tonalité de l’amertume et de la désillusion, comme si elle doit être nécessairement l’incarnation d’un idéal trahi ou déformé ? Cette question nous met face à une alternative qui envisage le rapport entre démocratie et histoire. Comme le considère, à juste titre, Pierre Rosanvallon dans La démocratie inachevée[3] (2000 :32) : « Il ne faut pas dire seulement que la démocratie a une histoire. Il faut considérer plus radicalement que la démocratie est une histoire ».
C’est ainsi que la philosophie politique peut l’examiner essentiellement en tant que régime qui ne peut se définir que par des pratiques multiples, donnant une carrière aux faits et mutations, ce qui lui permettrait de s’inscrire dans une histoire philosophique du politique. Cette histoire cherchera à analyser les différentes tensions aux travers desquelles la démocratie s’est développée et se forme au lieu de s’attacher à détecter les avatars de l’évolution d’une essence.
On peut donc à ce titre dire qu’en Tunisie, pays républicain, la démocratie était là mais sous un aspect différent de celui que l’on voit actuellement dans les pays d’Occident, elle est le fruit d’une politique répressive qui l’avait délimitée et définie à sa façon et selon des principes autres. Il est donc de son droit de se développer, et de prendre d’autres perspectives qui la rapprocherait des pays d’Europe et ailleurs dans le monde où elle est aussi adaptée au milieu dans lequel elle se trouve.
Partir donc de cette définition de la démocratie comme « le pouvoir du peuple » serait alors inadéquat car les termes de « peuple » et de « pouvoir » n’expriment nullement une réalité simple. Le pouvoir démocratique est plutôt complexe instaurant une tension, sans doute constitutive, entre le lieu de sa souveraineté et l’exercice du pouvoir. Nous vivons en effet sur cette contraction qui se résume en deux faits : considérer le peuple comme le souverain absolu, origine de tout pouvoir, et l’exclure en même temps de toute participation au pouvoir. En outre, lorsqu’on définit la démocratie par le pouvoir du peuple, l’on se demande alors de quel peuple il s’agit. Sans le déterminer, on court le risque de mythifier l’existence même du peuple. La démocratie serait, dans ce cas, constituée par un peuple homogène sans tensions, sans intérêts divergents, et qui serait en permanence intéressé par la chose publique. C’est ce modèle de la démocratie qui régnait en Tunisie sous Ben Ali et qui est arrivé à saturation. Or la démocratie est constituée d’un peuple hétérogène, traversé par des intérêts essentiellement divergents et contradictoires, ce que Bourguiba avait bien relevé dans ses discours, notamment celui de 1975 lorsqu’il déclara la république. Cette simple interprétation nous permet donc de dire que la démocratie est animée par cette tension-ci : face à un peuple composé d’intérêts hétérogènes et même antithétiques, elle doit non seulement leur donner une voix, mais aussi un consensus. Sans doute, c’est à une telle démocratie qu’aspirait Bourguiba en 1957, conçue non pas comme une essence enfermée dans une constitution, mais comme une dynamique par ses tensions propres.
On est donc face à deux traditions dans la pensée politique : la première tente de minimiser ces tensions et en les ordonnant à partir du concept d’équilibre ; la seconde les détermine comme irréductibles, et fait ainsi de lui ni un concept dominant, ni une idée régulatrice et raisonnée de la démocratie. La seconde considère ainsi que la démocratie est plutôt un régime où le conflit n’est pas une déchéance de l’ordre, mais bien l’expression du déséquilibre et de l’évolution du pouvoir.
Définir la démocratie par la mobilité, c’est finalement admettre le déplacement des lieux de pouvoir, condition de l’alternative que représente la séparation des pouvoirs. La caractériser par l’équilibre, c’est l’inscrire dans le principe de la séparation des pouvoirs. 
La réalité, dans le monde, nous montre habituellement que la démocratie repose presque toujours sur un déséquilibre de puissance. Le rapport du citoyen avec le pouvoir est un exemple illuminant d’un tel déséquilibre. Se pose, de ce fait, la question si cruciale de la liberté du citoyen dans une démocratie. Cette liberté ne signifie pas un affranchissement vis-à-vis de la volonté d’autrui et des décisions institutionnelles. La liberté politique, comme l’a souvent rappelé Bourguiba dans ses discours notamment ceux de 1965, que ce soit en Afrique ou au Moyen-Orient, est une liberté institutionnalisée : seule la présence d’institutions garantit les conditions de la liberté. Néanmoins, le propre d’une relation démocratique de pouvoir, réside dans le fait que la personne sur qui porterait une incitation ou une prohibition, doit conserver la possibilité de la démentir et de corriger les personnes qui ont pris cette décision. La démocratie n’existe finalement que dans ce jeu de provocation entre l’obéissance et la résistance : un jeu qui demeure délicat puisqu’il est pris dans une double inertie : celle du blocage de la controverse ou celle de l’inefficacité du verdict.
On se demande alors si la politique a affaire à des puissances qui visent l’équilibre, ou qui sont dans l’impossibilité de parvenir à cet état, de se comprendre et de se vivre dans un rapport continu d’actions et de réactions. La question se pose ici pour les penseurs du politique. Pour Montesquieu, Adam Smith et John Stuart Mill, les tensions politiques peuvent se réduire et s’équilibrer. Pour Montesquieu cet équilibre passe par la mise en place du concept de gouvernement modéré ; pour Smith de celui de la main invisible et enfin pour Mill il passe par la liberté de l’opinion. Par contre, pour d’autres comme Machiavel, Rousseau et Tocqueville la démocratie ne peut être comprise comme un régime où les tensions politiques sont supprimées, puisqu’elle est fondamentalement constituée de tensions insurmontables qui l’empêchent finalement de connaître la stabilité.

Ainsi, et pour finir sur ce dernier point, la démocratie apparaît non seulement comme une organisation équilibrée du pouvoir, mais aussi comme une organisation du pouvoir qui permet de transformer ces distensions en production de libertés et d’égalité. S’ouvre de ce fait une démocratie définie comme un espace de dissensions et de concessions où règne une tension entre la logique du pouvoir et celle de la liberté. Pour accéder à une telle démocratisation de la Tunisie, une réforme de l’esprit est nécessaire, elle commencera dans les institutions éducatives. Elle doit être conforme aux nouvelles aspirations humaines auxquelles appellent de leur vœu des penseurs contemporains. Edgar Morin se trouve être un de ces penseurs humanistes dont l’œuvre participe de cet espoir de réformer l’esprit dans une boucle récursive infinie. L’homme est placé non pas comme le centre du monde, mais comme celui qui doit centraliser ses efforts sur la sauvegarde de la terre et sur la promotion d’une « politique de l’homme » évoluant vers une « politique de civilisation ». Edgar Morin explique la voie d’une politique de l’humanité dans un récent ouvrage paru aux éditions Fayard (La Voie, 2011). En effet, l’humanité plus que jamais dans son histoire, se trouve aujourd’hui face à une « communauté de destin ». Les problèmes qu’elle rencontre impliquent nécessairement un appel à une politique de l’humanité. La communauté identitaire se construit par une prise de conscience du concept de « Terre-Patrie », autrement dit du fait d’une origine terrienne commune de l’humanité.  Les nouvelles révolutions actuelles au Maghreb et dans le monde arabe doivent donc évoluer vers une démocratie nettement plus démocratique que celle que l’on voit en Occident, prenant en compte la complexité qui est inhérente à notre univers, à rejeter les inégalités, les xénophobies, les attitudes régressives qui incitent à l’enfermement sur soit et au refus de l’autre.
L’amitié, la compréhension et la tolérance sont des valeurs importantes en politique et doivent ainsi nourrir les relations humaines dans la diversité qui les unit et l’unité qui les partage comme le souligne Morin. Il reste encore à expliquer l’importance du respect d’autrui dans toute politique de l’homme, du partage et de la fraternité. Le progrès s’avère aujourd’hui un mythe et révèle « l’arrogance intellectuelle occidentalo-centrique » (Morin, 2011, p. 49). Les autres communautés du monde sont une inépuisable source de richesse et de savoirs utiles pour notre humanité, une source de réflexion et de régénérescence intellectuelle.
Dans cette politique vouée à une nouvelle ère de l’humanité, celle qui se consacrerait à la mise en place de la Terre-Patrie, nécessaire à plus d’égalité et de justice, Edgar Morin appelle à harmoniser les liens entre Occident et pays dits « en voie de développement », terminologie née d’une « arrogance intellectuelle occidentalo-centrique » qui a souvent eu tendance à les inférioriser pour mieux les maintenir dans cet état. Pour Morin, en effet une meilleure politique de l’humanité doit reconnaître les caractéristiques inhérentes au fonctionnement de ces sociétés que ce soit du côté de leurs « défauts » que de leurs « qualités » : « il ne s’agit nullement d’idéaliser les sociétés traditionnelles qui ont leurs carences, leurs fermetures, leurs injustices, leurs autoritarismes. Il faut considérer leurs ambivalences, donc voir aussi leurs qualités. » (2011 : 49).
Du côté de l’Occident, il y a nécessité de bien réaliser aussi les deux côtés (positifs et négatifs) du progrès en en développant les bienfaits : c’est-à-dire « les droits de l’homme, les libertés individuelles, la culture humaniste, la démocratie » (2011 : 50).
Cette synthèse des cultures est celle à laquelle œuvrait Bourguiba avec son compagnon de route Senghor lorsqu’il a fait sa profonde réflexion  sur le projet francophone. Fondateur de la première république tunisienne, il demeure bien actuel dans ses idéaux et notamment dans sa conception très optimiste de l’avenir où l’homme est perfectible à l’infini, où tout se fait par l’action, où la bataille de chacun pour une politique de l’Homme est un devoir et un projet toujours à améliorer.


[1] Aristote, Les Politiques, Chapitre X, Gallimard. 1993.
[2] Edgar Morin entend par ce terme « écologie de l’action » « que toute action, une fois engagée, entre dans un jeu d’inter-rétro-actions dans le milieu où elle se déroule, et peut non seulement dévier de sa voie, mais déclencher des forces adverses plus puissantes que celles qui l’ont initiée pour revenir comme un boomerang frapper la tête des auteurs. ». Confère aussi La Méthode, t.6, Éthique, I, III.
[3] Éditions Gallimard, Paris.